Affaire de la Residence des Maires - Mme Célestine Ketcha Courtes, Maire de Bagangté : «Etre résident ne signifie pas être à résidence surveillée»

YAOUNDÉ - 17 Aout 2012
© Pierre Arnougou | La Météo

Rencontrée le 14 août, la maire de la commune de Bangangté répond aux députés, au sujet de la loi du 22 juillet 2007 portant obligation de résidence des maires dans leur commune.

Quel commentaire vous inspire la question du non respect de l'obligation de résidence des maires dans leur commune, évoquée par les députés lors de la dernière session parlementaire?

A l'heure de la décentralisation, caractérisée par un transfert progressif des compétences aux collectivités locales décentralisées depuis 2010, la présence des maires en poste est un facteur clé de succès pour ces nouvelles responsabilités, sources de développement durable des communes. La résidence ne doit pas être imposée au maire, c'est une nécessité qui est comprise, nous pensons, par la majorité des maires. Les députés devraient, eux-mêmes, s'appliquer cette règle de bon sens et être, en dehors des sessions parlementaires, présents dans leur circonscription électorale pour rendre compte de leurs travaux. Ce n'est pas parce que quelques maires ne résident pas en permanence dans leur commune qu'il faut faire un procès de l'ensemble des élus municipaux.

Par ailleurs, n'oublions pas qu'avant les élections, les candidats avaient et ont d'autres activités ou professions qui leur permettent de survivre, au regard du traitement salarial dérisoire des maires. Si les députés ont des avantages connus et enviables, il ne faut pas oublier que, jusqu'aujourd’hui, les maires n'ont pas de salaire tel que prévu dans la loi sur la décentralisation.

Au demeurant, la résidence des élus locaux est une nécessité, mais elle ne doit pas être comprise comme une immobilité ou, une fixation des maires dans les bureaux. Avec les Technologies de l'information et de communication (Tic), un maire doit être aujourd'hui capable de travailler partout où il se trouve, tout en étant aussi présent sur le terrain pour suivre la réalisation des projets socioéconomiques à lui confiés.


Qu'est-ce qui, selon vous, peut être à l'origine de ce phénomène tant décrié en dépit de l'existence d'une loi d'astreinte?

Comme je l'ai dit plus haut, il faut être honnête: en 2007 un candidat aux élections municipales sans activité génératrice de revenus pouvait-il réussir? Les candidats avaient, dans la majorité des cas, une autre profession leur permettant de répondre aux nombreux besoins des populations. Par ailleurs il n’était pas question de décentralisation que dans les textes. La prise en compte du salaire des maires, l'appui des communes en personnel qualifié, la prise en compte des sollicitations des maires, réitérée à l'occasion de la Journée africaine de la décentralisation (Jad), le 10 aout dernier, amèneront sûrement les maires à déléguer une partie de leurs pouvoirs à leurs collaborateurs, pour ceux qui ne l'ont pas encore fait, pour se concentrer un peu plus sur leurs nouvelles missions. Il s'agit notamment de la mise en œuvre des compétences transférées, de la réalisation et du suivi des projets sociaux.


La commune de Bangangté offre-t-elle des conditions idoines favorisant la résidence de ses élus locaux?

Nous avons essayé de mettre les agents dans des conditions optimales. Nous avons créé un service technique en recrutant des agents qualifiés dont certains, fort heureusement, sont payés par les partenaires du projet Modeab (Maîtrise d'ouvrage durable dans le secteur de l'eau et assainissement dans la commune de Bangangté, Ndlr) cofinancé par l'Aimf (Association internationale des maires francophones, Ndlr), la Fondation Veolia, l'Aesn (Agence de l'eau Seine-Normandie, Ndlr) et le Siapp (Syndicat interdépartemental d'assainissement de l'agglomération parisienne, Ndlr).

Ces partenaires mettent à la disposition de la commune un coopérant qui contribue au renforcement des capacités de nos agents du service technique, en travaillant au jour le jour avec eux. Tous ces efforts, il faut le reconnaitre ne suffisent pas.

L'Etat doit prendre en compte nos doléances. Nous souhaitons vivement, entre autres que, dans le cadre du transfert des compétences, le gouvernement détache d'urgence des techniciens des ministères pour des communes.


Pensez-vous que les objectifs du processus de décentralisation actuellement matérialisés, peuvent durablement être atteints malgré l'abandon des mairies par certains édiles?

Les maires ont tous l'obligation d'atteindre les objectifs de la décentralisation, car le développement durable est le résultat de la rencontre des besoins des populations à la base avec l'offre des services publics de base y relatifs. Ces services publics sont apportés à travers des projets sociaux, et les maires sont des personnes mieux indiquées pour enregistrer les besoins des populations, y apporter des solutions et suivre la mise en œuvre sur le terrain. Nous invitons le gouvernement à continuer à remplir ses engagements. Je pense, en revanche, que les magistrats municipaux feront face à leurs obligations.


Que faut-il faire pour amener les maires à respecter l'article 58 al.3 de la loi du 22 juillet 2007?

Comme je vous l'ai dit tantôt, il ne faut pas interpréter de manière outrancière cet article. Etre résident ne signifie pas être à résidence surveillée. Les responsabilités d'une bonne mise en œuvre de la décentralisation, pour le volet présence effective, incombent tant à l'Etat qu'aux maires.


01/09/2012
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