Affaire Bbj2 : Interrogations sur le sort des 31 millions de dollars

Cameroun - Affaire Bbj2 : Interrogations sur le sort des 31 millions de dollarsD’après les conseils d’Yves Michel Fotso, le Cameroun aurait déjà récupéré de l’argent et des biens d’un montant de plus de 22 millions de dollars. Si l’Etat, de son côté, continue de garder le silence sur la question, de nombreux points restent obscurs. Enquête.

Les faits

Depuis le 17 janvier 2013, Yves Michel Fotso a remboursé près de 900 millions Fcfa au Trésor public. Dans le courrier que son conseil adresse au ministre de la justice pour l’informer de ce remboursement, il indique que cela représente le montant dont doit s’acquitter son client dans l’enveloppe de ce que l’Etat doit encore percevoir dans le cadre de cette affaire. Ce qui sous-entend que l’Etat aurait déjà perçu des sommes ; et ressuscite du même coup des interrogations quant au sort des 31 millions de dollars pour lesquels Yves Michel Fotso et cinq co-accusés ont été condamnés à des peines allant de 10 à 25 ans de prison.

En effet, la somme remboursée par l’ex- Administrateur directeur général de la défunte Cameroon Airlines (Camair) a été calculée suivant une modalité qui a notamment intégré la déduction, de l’enveloppe globale, de ce que ses conseils désignent comme « diverses sommes dont a bénéficié l’Etat du Cameroun et/ou la Camair dans le cadre de cette affaire dite du Bbj2 ». Lesquelles sont alors chiffrées à 22 858 163 dollars, soit, en convertissant au cours de janvier 2013, 11 451 939 663 Fcfa. Dans la lettre susévoquée, Me Mandeng détaille ces sommes qui peuvent être subdivisées en deux groupes. Les déposits effectués auprès de Boeing et les dédommagements dont l’Etat a été l’objet après la liquidation de l’intermédiaire GIA.

2 milliards 4 millions Fcfa de déposits

Ce sont des sortes de garanties que le client Cameroun a dû verser ou faire verser au fabriquant Boeing pour confirmer ses commandes. Celles-ci sont, par principe, non remboursables, mais font bien partie du prix de l’avion commandé. Le premier de ces déposits, d’un montant de 2 millions de dollars, soit 1 milliard 2 millions Fcfa, a été effectué au mois d’août 2001 par le biais de GIA, une entreprise contactée alors pour jouer l’intermédiaire entre le Cameroun et Boeing. Ce premier versement a été décidé au cours d’une réunion tenue à la Présidence de la République le 14 août 2001. Et validé par le ministre des finances de l’époque, Michel Meva’a M’Eboutou.

Trace de ce versement se retrouve dans une correspondance adressée par ce dernier au Directeur général de la Cbc, la banque à partir de laquelle le virement a été effectué, où il fait la demande ciaprès : « Monsieur le directeur général, j’ai l’honneur de vous demander d’accorder à la CAMAIR une avance équivalente à 1 milliard 550 millions de Fcfa afin de lui permettre de payer avant le 20 août 2001 le déposit exigé pour l’acquisition d’un nouvel appareil. Ce concours ponctuel sera régularisé dans les délais les meilleurs et ne doit pas être comptabilisé avec les autres créances consenties à notre compagnie de navigation aérienne ». Un second déposit, d’un montant lui aussi de 2 millions de dollars, est également mentionné. Il correspond, d’après les avocats, à la nouvelle commande passée par le Cameroun, après l’échec de livraison du premier appareil (qui devait intervenir en mars 2002, ndlr). L’effectivité du versement de ces deux déposits est reconnue par Boeing dans une correspondance qu’il adresse à l’ambassadeur du Cameroun aux Etats-Unis, Jérôme Mendouga, le 13 août 2003. Le constructeur, qui fait une offre pour un avion de type 767-300 (qui n’est pas le Bbj, ndlr), fait mention de la présence dans ses caisses d’une somme de près de 4 millions de dollars correspondant aux deposits du Bbj2, laquelle est retenue comme déposit pour la nouvelle commande.

1 milliard 432 millions Fcfa de dédommagement

Incapable d’honorer ses engagements du fait notamment des conséquences de l’attaque terroriste du 11 septembre 2001, GIA est contrainte au dépôt de bilan. Un procès en liquidation de cette entreprise s’ouvre au tribunal de faillite de Seattle, dans l’Etat américain de l’Oregon en 2004. L’Etat du Cameroun y est partie, de même que la compagnie Indian Airlines à qui GIA louait également des avions. Me Akéré Muna, qui représente le pays, y est envoyé en 2005 avec pour mandat d’ « entrer en possession des pièces de la procédure engagée par l’avocat de la CAMAIR (Françis Nana), d’en prendre connaissance, d’identifier les parties adverses et de faire un rapport circonstancié jusqu’à l’annulation expresse de ce mandat. La finalité étant d’en savoir un peu plus sur Gia et de récupérer tout ou une partie du déposit versé à Gia pour l’acquisition d’un avion neuf ». Le procès dure deux ans et le tribunal, présidé par la juge Lynda Johansen, octroie au Cameroun 52% des actifs de GIA. Ce qui correspond à 858 163 dollars, soit 430 millions de Fcfa. La Camair, partie elle aussi au procès, s’en sort avec 2 millions de dollars, soit 1 milliard 2 millions de Fcfa.

Un avion à 8 milliards 16 millions Fcfa

L’accord de règlement et de cession mutuelle du 20 septembre 2006 octroie en outre à Yaoundé, à titre de dédommagement, un avion de type Boeing 767-200. Le tribunal de l’Oregon a justifié ce dédommagement après qu’il ait été démontré que c’est bien l’argent débloqué par l’Etat (les 31 millions de dollars, ndlr) qui avait été utilisé par GIA pour acquérir un avion et le louer ensuite à plusieurs clients. Lors des débats au Tgi du Mfoundi, il a été dit qu’un expert de Air France, M. Villoingt, détaché à la Camair, a évalué cet avion à 16 millions de

© La Nouvelle Expression : Serge-Lionel Nnanga


24/02/2013
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