Affaire Albatros: Paul Biya est-il «l’acteur principal»?

DOUALA - 24 Mai 2012
© Edouard KINGUE | Le Messager

Dans sa troisième lettre, Marafa Hamidou Yaya met enfin le doigt dans la plaie

Décidé à ne pas «mourir seul», Marafa Hamidou Yaya a, dans une stratégie progressive, mis le doigt dans une plaie dont la purulence est à la mesure de la mauvaise gouvernance, un cancer qui ronge le Cameroun depuis 30 ans. Contrairement à ses deux premières lettres ouvertes au président Biya, le troisième pli de Marafa Hamidou Yaya est directement adressé au peuple camerounais, par celui qui, redoutant des entourloupes politico-judiciaires, revendique «toute la transparence à travers un procès équitable», dans le cas où ce serait pour l'affaire Albatros qu'il est incarcéré. Mais, un train pouvant en cacher un autre, le cas Marafa Hamidou Yaya apparaît pour le moins explosif au regard de cette 3è lettre.

«Qui a peur d'un procès transparent et public?», s'interroge le prochain nouveau locataire d'une caserne militaire où il est en voie de transfèrement. S'il dit ignorer tout du détournement des fonds destinés aux avions présidentiels, l'auteur de la 3è lettre offre au public quelques pistes de recherches pouvant induire des responsabilités de ceux qui, tapis dans l'ombre, auraient décidé de l'achat d'un aéronef présidentiel et du décaissement de l'argent à cet effet: «pour quelles raisons le ministre de l'économie et des finances a-t-il préféré transférer de l'argent à Gia International plutôt que d'utiliser la solution sécurisée de la «stand by letter of crédit» qui était proposée»? se demande l'ex-ministre d'Etat qui poursuit: «qui a décidé d'utiliser le guichet Snh pour payer les 31 millions de dollars?». Autre question de Marafa: «Pourquoi avoir décidé d'acquérir un Boeing 767-300 Vip en lieux et place du Bbj-II, Boeing 737-800 déjà fabriqué?» le ministre d'Etat croit savoir que les réponses à ces questions permettraient d'édifier les Camerounais et «prouveront mon innocence dans ce qui semble m'être imputé».

Selon nos informations et pour essayer de voir clair dans ce dossier, Meva'a Meboutou était ministre des Finances et du budget en 2002, au moment où Atangana Mebara remplace Marafa Hamidou au poste de secrétaire général à la présidence. Meva'a Meboutou a auparavant occupé le poste de ministre de l'Economie et des finances dans le 25è gouvernement de Biya en 2001. Il est présenté comme «la véritable cheville ouvrière de cette affaire, pour avoir ordonné le décaissement des 36 millions de dollars (environ 18 milliards F Cfa ndlr) volatilisés». Nos sources croient savoir que l'utilisation du guichet Snh est une décision qui a été prise «à partir de la présidence de la République, donc du chef de l'Etat», idem de la décision d'acquérir un Boeing 737-300 Vip en lieux et place du Bbj II déjà construit à l'époque des faits. Marafa semble donc proposer entre les lignes que c'est le chef de l'Etat en personne qui est l'auteur de l'affaire Albatros et des conséquences subséquentes.

La conférence nationale souveraine, commencée dans l'informel depuis les années 90, va-t-elle connaître une brusque accélération du fait de cette terrible affaire Albatros? On peut tout de même spéculer sur la durée et le temps mis pour que les premiers suspects soient interrogés par la police ou tout simplement arrêtés et écroués. L'achat de l'avion présidentiel est décidé en 2000 et aboutit pratiquement en 2003. A ce propos, écrivant au chef de l'Etat, son ancien ministre de l'AT souligne dans sa première lettre: «Est-il besoin de vous le rappeler, monsieur le président de la République, que c'est moi qui vous ai sollicité, par correspondance en date du 7 mai 2008 à vous adressée, pour être entendu par les instances judiciaires compétentes, afin d'apporter mon témoignage et contribuer à la manifestation de la vérité dans cette scabreuse affaire que vous connaissez mieux que quiconque parce que régulièrement informé de ce processus d'acquisition de votre avion, que vous suiviez au jour le jour?». Marafa ajoute: «Vous savez bien que mon incarcération n'a rien à voir avec cette affaire pour laquelle je ne suis coupable d'aucun délit et surtout pas de celui que vous avez instruit que l'on m'impute. J'espère que les débats à venir permettront à nos compatriotes de savoir quel est le rôle joué par tous les intervenants, et cela à tous les niveaux».

Alors, simple affaire de droit commun ou règlement de comptes aux relents politiques? Difficile pour l'instant, de se prononcer dans une affaire qui ne fait que commencer et qui promet des rebondissements.



24/05/2012
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