Affaire Albatros: La liste des prête-noms d’Yves Michel Fotso

YAOUNDE - 14 MAI 2012
© Darline Datchoua | La Nouvelle

Ils lui ont permis de récupérer les 27 millions de dollars avancés par la Snh à Boeing. Cet argent avait transité par CBC Tchad et CBC RCA pour atterrir dans des comptes domiciliés à la CBC Cameroun. Une autre partie dans d'autres comptes bancaires ouverts à travers le monde. Plus précisément aux îles Caïmans et en Afrique du Sud. Décryptage.

«Les personnes mises en cause dans le détournement de la tranche de 27 millions de Dollars Us avancés par la Snh pour l'achat du «Bbj-2» présidentiel sont: Yves-Michel Fotso, Marafa Hamidou Yaya, Fernando Gomez Mazéra, Russel L. Meek, dame Sandjong Gisèle, Mamadou, Ying André, Ndonmo, Youmi Raymond, Tchana Hugues, Ngoumba, Mandeng (...) Ces personnes n'ont pas encore été soient identifiées, soient inculpées, soient interrogées

Voilà en substance un extrait de l'ordonnance de disjonction de la procédure signée le 3 févier 2010 par le juge d'instruction, Pascal Magnaguemabé. Si le magistrat entend clairement indiquer que les investigations allaient se poursuivre pour démêler les écheveaux de ce casse du siècle, des sources très bien informées indiquent que, sur les 31 millions de dollars virés dans le compte de Gia International à la Bank of America à New-York avec pour bénéficiaire Boeing, 16 millions de dollars seulement sont revenus au Cameroun. Par la suite, cette rondelette somme d'argent va faire l'objet d'un partage dans les guichets de la Commercial Bank of Cameroon (Cbc) par la coterie maffieuse. D'ailleurs, pour la plupart des amis de l'ancien Adg de la Camair, les personnes utilisées comme prête-noms auront également bénéficié des commissions dans le cadre du transfert de ces sommes dans les comptes de ces derniers domiciliés à la Cbc Bank. Cité par exemple dans l'ordonnance parmi les experts qui ont effectué le voyage de Victorville en Californie pour inspecter l'état du Boeing 767-200, Louis Taniform bien qu'agissant au nom de la Cameroon Civil Aeronautic Authorithy (Ccaa) a émargé un petit pactole. Pour la petite histoire, du 9 au 17 août 2003, le colonel Justin Mitlassou, ex-officier supérieur de la liaison Air de l'état major particulier de la présidence de la République, Louis Taniform, le beau-frère de Sama lgnatus à l'époque Dg de la Ccaa, Jean Tchuidjang (en fuite en France) et Jean Ngangue de la Camair ont séjourné à Victorville pour apprécier de visu l'Albatros dont on disait en bon état. A la clé, un rapport final de mission qui laisse tout le monde pantois: l'Albatros n'était qu'un vieux coucou de 18 ans. Il aura donc fallu qu'on constate qu'un membre des experts camerounais ayant effectué le déplacement des Etats-Unis, en l'occurrence le colonel Manfred Bakoa, n'avait pas paraphé ledit rapport pour avoir les premiers ressorts de l'affaire. D'ailleurs, son audition à la police judiciaire a permis de mieux confondre Jean Marie Atangana Mebara qui avait soutenu que l'Albatros était en bon état. D'aucuns ont estimé que pour avoir biaisé le rapport d'inspection, le colonel Justin Mitlassou avait été limogé. Faux, rétorquent certains observateurs avertis. C'est la vente d'un hélicoptère accidenté au groupe Bell (le fabriquant des hélicoptères américains) en pièces détachées qui serait la véritable cause de sa mise à la retraite d'office. Toutefois, en sa qualité d'expert, Louis Taniform aura engrangé des frais de missions s'élevant à 12 825,20 $ Us. Un peu moins que son collègue, expert de la même mission, le lieutenant colonel Charles Ndongue qui n'aurait pas perçu le même montant. Dans la galaxie de ceux qui sont dans le viseur de l'affaire Albatros, l'ordonnance de disjonction de procédure de Pascal Magnaguemabé parle aussi de François Ngoubene. Inamovible percepteur de l'ambassade du Cameroun aux Etats-Unis, le juge d'instruction, Pascal Magnaguemabé estime dans son ordonnance que, pour une bonne administration de la justice, il serait intéressant, non seulement d'entendre François Ngoubene qui recevait les fonds débloqués pour l'acquisition de l'avion présidentiel, mais surtout de l'utilisation faite. Selon certains commentateurs avisés en effet, identifié depuis quelques temps comme étant la plaque tournante d'un vaste réseau de détournements de fonds publics à partir du Cameroun, François Ngoubene serait une très bonne piste pour la manifestation de la vérité. Surtout qu'en pareilles circonstances, prétendent ses détracteurs, l'homme ne cacherait pas ses appétits financiers insatiables. Alors question : qu'est-ce que le tout puissant percepteur de Washington aurait-il touché dans cette affaire de l'acquisition d'un aéronef présidentiel aux circuits sinueux où son ambassadeur de l'époque, Jérôme Mendouga s'en sort quand même aujourd'hui avec 10 ans d'emprisonnement ferme? Si l'ordonnance de disjonction de procédure de Pascal Magnaguemabé reste muette sur la question, l'ex-ambassadeur du Cameroun aux Etats-Unis pourrait davantage éclairer la justice sur le cas François Ngoubene.


Véritables prête-noms.


A côté de ce percepteur, Jean Marie Assene Nkou, Ancien député Rdpc du département de la Mefou et Afamba et promoteur de la compagnie aérienne Nacam reste une cible constante. Il peut à juste titre se considérer comme un miraculé du 16 avril dernier, jour des arrestations de Thomas Ephraïm lnoni et Marafa Hamidou Yaya impliqués l'un pour l'affaire Albatros et l'autre pour l'affaire de l'acquisition d'un Bb jet II présidentiel. Aujourd'hui le retour au bercail de ce proche de l'ancien Adg de la Camair est plus qu'hypothétique. En effet, rendu en France pour suivre l'état de santé de son fils malade, des sources internes à la famille indiquent qu'on lui aurait conseillé de venir se mettre à la disposition de la justice de son pays, afin d'être près des siens. Des sources bien informées, l'ancien parlementaire avait servi de courroie de transmission entre Gia et Yves Michel Fotso. Le premier contact serait noué par le canal de dame Esther Gouet, cadre à la défunte Camair. D'ailleurs, indiquent nos antennes, au cours de son audition à la police judiciaire, Jean Marie Assene Nkou avait nettement reconnu avoir été mandaté par Gia international en 2001 pour engager des négociations avec plusieurs compagnies aériennes de la sous-région. D'après Russell Meek, l'ancien député de la Mefou et Afamba avait perçu dans le cadre des commissions sur les acquisitions d'avions effectuées par Gia international Ltd, 1 million de dollars, 300 000 dollars, en septembre 2001, plus 2 avions de marque Spray Ag planes. Des rétro-commissions qui sont aujourd'hui évaluées à plus de 50 millions de FCFA.

Parmi les véritables prête-noms d'Yves Michel Fotso, on retrouve Gisèle Sandjong qui officiait à l'époque comme gestionnaire des comptes à la Cbc Bank. Délit d'initié, commentent des sources proches du dossier. Très connue dans les milieux de la jet set de la métropole économique, des sources crédibles indiquent qu'elle faisait partie du très proche entourage de l'ancien Adg de la Camair, Yves Michel Fotso. Dans la mangeoire de l'acquisition de l'avion présidentiel, son compte bancaire à la Cbc aurait été utilisé par l'ancien Adg pour faire le transit des sommes rétrocédées par l'avionneur dont Yves Michel Fotso aura touché sa quote-part. Montant viré dans le compte de Gisèle Sandjong: 450 000 000 de FCFA. Excusez du peu!

Le stratagème est le même pour les personnes suivantes dont les comptes étaient domiciliés à la Cbc. Pour éviter d'être suspecté par les agences en charge de la criminalité financière (Tracfine, Anif, Cobac et autres), l'éclatement du montant des sommes rétrocédées par l'avionneur et distribuées entre les membres de la mafia ont transité par les comptes de André Ying (connu dans la ville de Douala et proche de Yves Michel Fotso: 1 250 000 000 FCFA); Ndomno (850 000 000 FCFA); Raymond Youmi (565 000 000 FCFA); Hugues Tchana (petit affairiste chargé des conquêtes féminines de son mentor Yves Michel Fotso: 235 000 000 de FCFA); Ngoumba (200 000 000 FCFA); Mandeng (100 000 000 FCFA).

Selon des sources dignes de foi, une partie des 27 millions de dollars a également alimenté les comptes de certains ministres encore en poste. On indique que la part de Marafa Hamidou Yaya aurait atterri dans un compte en Afrique du Sud. Celle d’un ministre régulièrement cité depuis quelques temps dans l'affaire de l'acquisition de l'avion présidentiel aurait par contre atterri dans un compte aux îles Caïmans.


14/05/2012
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